Seasick Steve – Can U Cook ?
Dans ce neuvième album solo depuis 2006, le septuagénaire californien Seasick Steve nous propose une nouvelle fois de puiser dans son histoire personnelle – pas toute rose admettons le – pour composer un album blues de 13 titres qui est à la fois introspectif mais aussi une épopée vers le grand ouest américain.
Sur la route du blues
Tel un ZZ Top qui aurait laissé filé sa vocation en route, Seasick Steve est à la fois une machine à composer sur le tard, à la fois un homme qui a survécu à une attaque cardiaque, à la fois un bricoleur infatigable de homemade guitares et enfin un buveur reconnu de whisky. Il est tout ça à la fois, Seasick. C’est ce qui paraît-il ferait sa légende. Pendant longtemps, il a fait profiter son talent à de jeunes groupes pas encore mûrs pour le succès, les accompagner vers les sommets, pêle-mêle : Nirvana (!!!), Modest Mouse, Bikini Kill. Après un premier album Cheap sorti en 2004 avec le groupe suédois The Level Devils, il débute réellement sa carrière solo en 2006 avec Dog House Music, vendu à 500 000 exemplaires. Après divers albums intermédiaires qui amèneront sa consécration à un niveau auquel il ne s’attendait pas, le hobo californien nous présente en cet automne 2018 un opus qui fait un nouvelle fois le point sur ces errances passées tout en envoyant des mélodies blues avec une nonchalance très américaine.
La sagesse Seasick
Il faut bien reconnaître que Steve a su séduire d’emblée un auditoire – surtout européen – qui a été charmé par l’authenticité de ses textes à la fois négligés et affirmés. Il nous renvoie l’écho du grand rêve américain qu’on ne se cache plus d’idéaliser. En débutant son album par Hate da Winter c’est comme s’il balayait d’un coup très énergique (rock ‘n’ roll même) cette vie faites de mille vies. Dès le second morceau Sun on my face on retrouve la ballade blues si chère à l’américain, comme s’il était de nouveau apaisé par tous les tumultes vécus. Entre alternances blues et rock qui s’enchaînent plutôt bien, Can U Cook? débarque comme le titre éponyme de l’album mais aussi son moment le plus phare. Jouée sur une homemade guitare, un Diddley Bow personnel, le Californien présente ici un phrasé très en accord avec son âge avancé mais aussi un texte résumant parfaitement la visée de cet album : faire le bilan de ses errances passées pour ne plus les reproduire. Seasick Steve clôture sa production avec Company, quelque chose qu’on écouterait volontiers au volant d’une Mustang 1965 entre Chicago et la Louisiane. Ce nouvel opus ressemble à ce qui pourrait être le dernier d’une belle carrière.
Finalement, celui-ci met en valeur le talent qu’à son auteur pour maîtriser le rythme musical en alternant avec efficacité les ballades blues sur-teintées d’harmonica et les mélodies rock ‘n’ roll sublimées par les guitares en tous genres. Seasick Steve sera sur la scène du Bataclan le 28 novembre prochain pour nous présenter Can U Cook ? Mais au fait, à qui s’adresse cette question ?
Bastien Boisson