Kevin Morby – Sundowner
Balade bucolique entre mélancoliques avec Sundowner de Kevin Morby
Quoi de mieux en ces temps froids à une époque hostile de s’imaginer au bord d’une cheminée crépitante avec du Kevin Morby qui vient doucement cogner les ondes auditives de nos âmes occupées ? A-t-on besoin de plus pour frôler doucement la notion de bonheur stoïque ? Je peux vous certifier que c’est presque un non, tant subjectif qu’objectif et c’est grâce au nouvel album court mais direct de notre folkeux blond préféré.
Sundowner commence avec Valley, et on se promène avec Kevin dans les contrées de ses réflexions, le soleil pointe encore le bout de son nez et on se complaît à simplement le contempler. On reconnaît toujours et encore sa patte musicale, qui alterne entre chant désespéré par la beauté des choses simples et un solo presque country qui nous balance en une seconde à Brother, Sister. Le tempo est haché, Morby slame presque dessus et indique des notes westerniennes d’un autre temps qui nous propulsent alors dans un saloon à l’allure colonial où les chercheurs d’or se cherchent aussi eux-mêmes.
On arrive avec Sundowner, éponyme de son nouvel album, la balade continue, on sort des contrées occupées et le soleil commence enfin à se coucher. L’accord voix et guitare se marie à merveille, on commence à prendre l’habitude avec l’artiste. Exit l’Amérique trumpiste actuelle, on redécouvre des paysages oubliés et des soleils cachés grâce à Kevin Morby. On s’installe vraiment avec Campfire, réminiscence des précédents albums comme Oh My God, on y trouve des similitudes et les basses se font plus graves et présentes. Le feu de camp commence, les bruits de pas s’installent, une voix féminine résonne au loin, celle de sa chère et tendre, dans la vallée texane, Kevin change de ton et s’épanche et hurle par son calme, on est scotché par le nouveau rythme, l’appel à la mélancolie du Sundowner est lancé. On perd la boussole avec Wander, des allusions noisy décorent le titre sur presque deux minutes et tout s’arrête, c’est presque trop court, mais la pudeur nous freine et laisse part à Don’t Underestimate Miswest American Sun. La douceur et la contemplation sont de mise dans ce nouvel album, alors on l’estime et on se réfléchit au sens de nos vies alors, avec Kevin. Ces cinq minutes se contemplent et agissent sur l’inconscient, on se met à questionner notre construction, et si tout se déconstruisait alors, rien ne s’est figé sauf quand on le décide, mais on peut garder inertes des images gravées telles qu’un soleil du Midwest américain. On arrive à l’hôtel, le bivouac est terminé, A Night At The Little Los Angeles, loin du silence des forêts mais aussi du brouhaha de la cité des anges, on s’imagine des étoiles au plafond et on contemple le bruit de nos voisins, de nos prochains, on rêve aussi de leur vie, à travers nos yeux on visualise l’intimité sans y apposer un prix. Los Angeles est douce, elle dance lentement avec Kevin et s’articule avec une nouvelle temporalité loin d’être frénétique.
Les rêveries peuvent aussi nous ramener à des douleurs qui s’estompent avec le temps mais qui resteront présentes, Jamie et Desi sont des amis partis de Kevin, il leur rend hommage avec la légèreté que le deuil aggrave pourtant. La comptine est belle, intime, sans étalage d’artifice et laisse place à l’espoir simple de Velvet Highway. Comme si Kevin Morby avait trop chanté jusque-là, le piano lance une ode à la vie et les notes pleuvent lentement, elles tapotent à l’orée du tympan avant de se noyer dans une mer de silence. Le voyage avec notre guide Morby prend bientôt fin, Provisions nous alerte, rien ne se ressemble finalement dans cet album confiné, le songwriter nous fait son discours d’au revoir, on se surprend à le remercier d’avoir eu la chance de l’accompagner dans ce projet, on prend compte de ses remarques et on stocke des provisions pour le corps et surtout pour le cœur jusqu’au prochain album.
Hélène Chu