RAMMSTEIN

Rammstein – Rammstein

juin 2019 |

Dix ans d’attente. Il ne s’agit pas de Tool mais de Rammstein.

Après Liebe ist für alle da sorti en 2009, le célèbre groupe germanique revient avec un nouvel album, arrivé le 17 mai 2019 et désigné de façon éponyme. Cependant, il n’a en réalité aucun nom, se démarquant ainsi des précédents albums nommés après un titre. Le visuel sobre évoque la pyrotechnie du groupe, malgré qu’une allumette soit un choix ambigu pour décrire la puissance de leur musique. Cette simplicité et cette absence de nom pourraient retranscrire une volonté de mettre la composition au premier plan.

Le minimalisme de l’artwork vient trahir la production. Véritable claque, le son est massif et occupe l’ensemble du spectre. Le groupe a choisit Olsen Involtini comme producteur après six albums produits par Jacob Hellner. Le premier titre Deutschland démontre parfaitement cette richesse et cette puissance sonore, avec un refrain assez martial. Le synthé, omniprésent, introduit la plupart des onze chansons mais ne noie pas le reste des instruments. Les guitares nous évoquent directement Rammstein en proposant des riffs pêchus, soutenues par une basse quibrille sur Hallomann. On peut noter quelques nouveautés dans la composition du groupe, comme l’ajout de chœurs d’opéra sur Zeig Dich, ou encore le titre Ausländer. Ce dernier,très dansant, est un véritable «étranger» dans la discographie du groupe. Il met d’ailleurs en scène un chant en différentes langues, passant notamment de l’allemand au français. Malgré cette différence, le clip est teinté d’une esthétique Rammstein, où les membres du groupe apparaissent comme des «colons modernes».

Après les cinq premiers titres, le groupe délivrent trois chansons pouvant déconcerter l’auditeur. Malgré le chant torturé de Till Lindemann sur la fin de Puppe, on fait face à une douceur contrastante. Diamant est une véritable ballade acoustique bien moins chargée en termes sonores par rapport au reste, et on peut se demander si c’est bien Rammstein qu’on écoute. Cependant, la narration de Puppe nous rappelle celle de Mein Teil, offrant une histoire très sombre. Les paroles de Diamant, qui au début semblent parler d’amour,pourraient revêtir un double sens bien plus triste. Le groupe reprend son identité sur la fin,notamment avec Tattoo : il reste donc sur certains acquis et cherche a expérimenter au fur et à mesure que l’album avance, mais conclut sur une note familière.

Cet album, très riche, peut cependant être un facteur de division chez les amateurs du groupe. Le titre Deutschland, qui traite de l’histoire et de la séparation allemande, peut résumer l’écoute. Pourtant, certains textes sont dénonciateurs, et on retrouve une caractéristique fondamentale de Rammstein : un esprit critique, Amerika étant un parfait exemple. Le titre Zeig Dich offre la même chose, en relatant l’hypocrisie dont est capable le christianisme. Même si l’instrumentale varie au cours de l’album, les textes de Till Lindemann retranscrivent l’esprit du groupe.

Pour conclure, l’artwork est très bien pensé : mettre en avant une recherche musicale très diverse. L’allumette représente donc bien le son de l’album. Certaines chansons sonnent très Rammstein et évoque directement un feu puissant, mais d’autres sont plus subtiles et retenues comme une légère flamme.

Pierre Lemoine