Molly Nilsson – 2020
Molly Nilsson et son retour vers le futur avec 2020
Discrète depuis toujours, avec son public, Molly Nilsson est reconnaissable avec ses grands yeux bleus et sa courte frange blonde à la mode berlinoise mais surtout pour sa voix atypique légèrement éraillée accompagnée de beats synthé lo-fi à tendance dark. Du vestiaire du Berghain au-devant de la scène wave et underground, Molly Nilsson a enjambé la situation d’un coup de maître grâce aux expériences et son indéniable sensibilité musicale.
Son huitième album raconte une escapade et un vol raté de Nilsson dans la ville de tous les possibles, Tokyo. La ville qui ne dort jamais, frénétique, effrénée, au milieu de tout ça : une tête blonde à l’aéroport qui réfléchit et décide de sa prochaine œuvre grâce aux prochains JO, 2020.
Le cocktail est étonnant, au fur et à mesure de l’écoute de l’album, on se retrouve bloqué dans l’espace-temps, on se croit dans Lost In Translation avec une grande empreinte Bleu Presque Transparent (de l’auteur Ryu Murakami).
2020, un album pépite qui donne le jet-lag
2020 démarre avec Every Night Is New, plongée dans la nuit de Molly à Tokyo, on la poursuit entre les terminaux et on fuit vers un avenir plus heureux. On croque la vie à pleines dents grâce A Slice Of Lemon, les deux chansons sont similaires mais sans ennui on continue l’écoute. Fin du tempo, Out Of The Blue est une chanson aquatique, on peut reprocher cependant la lenteur sublimée qui jure avec les paroles qui peuvent paraître abruptes à la première approche. Apnée arrêtée, Your Shyness est une balade intéressante mais revue, très agréable surprise ensuite avec Intermezzo : My Mental Motorcycle. Cette dernière track est suave, entraînante, on se découvre le plaisir de rejoindre le manège émotionnel de Nilsson pendant trois minutes et dix secondes. Allitération auditive avec Serious Flowers, on retrouve toujours la même inspiration que les deux premières tracks de l’album, c’est presque dommage. Envolée rythmique puissante avec Gun Control dès les premières secondes, la chanson est pudique tout en étant politisée, on apprécie son parti pris. La batterie est plus que présente dans Days Of Dust, poussières d’étoiles et trainées lumineuses dans les yeux et les oreilles, tout aussi puissante que la track précédente. Molly Nilsson se révèle totalement dans cette deuxième partie d’album, au diable la pudeur du début, elle se déshabille complètement et emporte sa voix de plus en plus haut. On ferme les yeux désormais avec la dernière chanson proposée par l’artiste, Blinded By The Night, retour sur les bancs de l’aéroport de Tokyo, fin de l’escapade sentimentale qui a duré trente-cinq minutes avec Molly, on est presque déchiré de devoir la quitter sur le tarmac.
Hélène Chu