Tinariwen

Elwan de Tinariwen

février 2017 |

Un nouvel album de Tinariwen, c’est un visa supplémentaire tamponné sur un passeport; une invitation au voyage, une promesse d’horizons lointains. Pour l’auditeur, rien n’est pourtant gagné d’avance. Le dépaysement se mérite. Le blues rock touareg que construit Tinariwen tout au long des 13 pistes d’Elwan s’apprivoise lentement, progressivement.

Tout d’abord, il faut reconnaitre que la section rythmique souvent saccadée et mouvante (l’amateur de musique Gnawa sera ravi) nous éloigne de nos percussions métronomiques habituelles. Ensuite, le chant, masculin, tantôt solo tantôt choral, une grande tradition de la musique africaine, surprend aussi nos oreilles occidentales. Mais, à quoi bon voyager si c’est pour retrouver le confort de nos habitudes ?

Tinariwen bouscule la tradition de la musique touareg, électrifie le guitare-blues malien du grand Ali Farka Touré et occupe de nouveaux territoires sonores. Au fond, après presque 40 ans d’existence, les membres de Tinariwen poursuivent leur œuvre de résistance et de revendication de l’identité tishumaren, population subsaharienne devenue sans travail et en perpétuel exil.

Sur ce nouveau recueil, Ibrahim Ag Alhabib perpétue l’hospitalité légendaire de son peuple en accueillant d’excellents collègues guitaristes ou chanteurs. Après TV On The Radio ou Santana, c’est Kurt Vile et Mark Lanegan qui participent à  quelques morceaux bien sentis. Ces featurings et les soutiens multiples dont bénéficie le groupe font partie de l’histoire du groupe. Aujourd’hui, Damon Albarn, Thom Yorke, Bono, Robert Plant ont tous affiché leur admiration pour le style de musique que Tinariwen diffuse lors de leur incessantes tournées.

Durant sa déjà longue existence, Tinariwen a vu bon nombre de ces membres quitter la formation pour voler de leurs propres ailes : Tamikrest, Bombino ou encore Terakraft. Ils sont aujourd’hui autant d’ambassadeurs d’un courant musical parti apporter au monde de précieuses mélopées à un rythme lent, parfois lancinant, rappel des ancestrales méharées. Il serait dommage de laisser passer cette caravane sans y monter.

Nicolas Duquenne

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