Daniel Darc – Chapelle Sixteen
Chapelle Sixteen s’ouvre sur une génuflexion dans un chœur d’église… Immersion dans ce tome testamentaire de Daniel Darc et abyssal s’il en est.
L’album est double, 29 pistes, face A de son vivant, face B achevée sur la base des voix enregistrées et d’une tracklist actée à temps, avec des intermèdes d’intimité, mais surtout un don d’aspérités du leader de Taxi Girl qu’on retrouve, éternelle rock star et doué de cette sensualité à fleur de peau, sur Sweet Sixteen – clin d’œil à Ken Loach ou/et à Billy Idol – mais éternel amoureux comme dans cet hymne aux femmes de sa vie dans La dernière fois ou la douce Période Bleu.
Ce qu’on lit en filigrane dans ce legs duel – la Chapelle le prie, les Sixteen des démesures résonnent – c’est une victoire de Darc sur la vie même si cette vie brûlée comme une chandelle par les deux bouts, nous l’arrache cet an 2013. Il y a lumière au bout du tunnel mise en musique dans l’envolée du sublime Que sont devenus les hommes. De l’Enfer, il a ressurgi en phœnix et dans une foi manifeste et de se rappeler que sur la fin de sa vie, ce juif converti au protestantisme est guidé par la Bible et paternaliste à faire imploser les cœurs de pierre dans sa berceuse Les enfants aux cordes savamment frappées et saturées.
Un tome en clair obscur, des flutes psychédéliques, des notes pianistiques, des guitares seventies… C’est Laurent Marimbert qui est à la réalisation, que le chanteur Christophe avait eu le talent visionnaire de présenter à Daniel. Laurent Marimbert qui pour la belle histoire a finalisé douloureusement Chapelle Sixteen trois mois après la brutale disparition du génie. Et les veillées auront été réciproques qui portent l’œuvre dans l’immensité.
Ça prend aux tripes, ça émeut et bouleverse – Mauvaise Journée est un apogée dans ce sens.
Références en pagaille, transesthétiques, des balades de jour et de nuit dans le Paris de Ménilmontant, de Montmartre… dans le Paris souterrain… les protagonistes (James Brown, Lou Reed, Jean Renoir pour ne citer qu’eux… ) virevoltent autour d’un Darc exposé sous toutes ses cicatrices, dans toute son indécente beauté.
Pour toi j’espère qu’il restait un peu de place au Paradis… C’est notre cœur qui éclate dans le tien Daniel… D’accord ?
Charlotte Lafon